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Bernard Guillaume, pour la gloire de l’Empire

Marc Aurèle: “Dis-moi, Maximus, pourquoi sommes-nous ici?” 
Maximum: “Pour la gloire de l’Empire, sire”

Mercredi 10 mai 2017, la salle du conseil communal est noire de monde. Ce soir, c’est “journée portes ouvertes” à destination des nouveaux habitants. Ils sont six échevins ainsi que le bourgmestre à les accueillir. Parmi les six hommes, seul Bernard Guillaume porte une cravate. Il est là, debout, l’écharpe scabinale à la taille, le buste droit et l’air cérémonieux.
Après la présentation du Bourgmestre, et alors que ses collègues prennent le temps de partager quelques bons mots en petit comité, lui se dirige en silence vers son bureau en attente des habitants venus faire le tour des cabinets.
A-t-il passé une mauvaise journée? Est-il fatigué? Contrarié? Non, il est tout simplement dans son rôle, un rôle qu’il n’a pas besoin de surjouer: celui d’échevin de l’Etat civile et du service population. Il n’est pas échevin comme beaucoup peuvent l’être: dans l’air du temps, familier, relax, “cool”. Non, Bernard Guillaume considère son mandat d’échevin comme une fonction à honorer, dont il faut se montrer digne, et ce d’autant plus qu’il s’agit d’une fonction “régalienne” par excellence dans le chef d’une commune: celle d’officier chargé des missions d’état civil.

Les habitants sont donc là, dans son cabinet à écouter les explications, dans un style très solennel, des missions qui lui incombent: la tenue des registres, la célébration des mariages, la gestion quotidienne des différents bureaux de son administration (nationalités, naissances, décès, mariages, permis de conduire, cartes de stationnement, etc..), l’organisation pratique des élections (envois des convocations, duplicatas, enregistrement des électeurs), la gestion du cimetière communal, etc.
Le service population, passage quasi-obligé pour tous les habitants, est une vitrine importante pour une commune. Il faut dès lors se montrer à la hauteur en termes de niveau de service, et ce, tant dans la qualité que dans la rapidité des prestations, sans parler de la convivialité de l’accueil. Ce sont ces paramètres qui déterminent “l’expérience client” de l’usager, une expérience qui façonne l’opinion qu’auront la plupart des habitants de leur administration, et par corollaire, du pouvoir communal.
En plus des contraintes qui découlent de l’afflux constant des habitants aux guichets, il y a les changements permanents de réglementations et de procédures qui nécessitent une indéniable capacité d’adaptation de la part des agents et des cadres (une centaine pour Schaerbeek). La plupart des actes posés par ceux-ci ont une portée individuelle directe et sont de nature hautement réglementaire.
Dès lors, rigueur, intégrité et méthodologie sont essentiels dans ce type de service. Ceci est encore plus vrai dans une commune qui doit faire face à de nombreuses problématiques comme les mariages blancs ou la fraude à la domiciliation.

Rigueur et intégrité donc, des valeurs qui caractérisent bien la manière dont cet échevin vit et gère ses compétences. Des valeurs qui doivent sans aucun doute beaucoup à une figure qu’il affectionne et dont les références sont omniprésentes dans son cabinet: Napoléon Bonaparte.
Il y a dans l’attitude et dans le style de Bernard Guillaume quelque chose du haut fonctionnaire républicain, du serviteur de l’Etat au-dessus des idéologies partisanes. Son seul fil conducteur est le respect de la Loi, et rien d’autre. Lorsqu’un Alain Courtois prend des libertés avec celle-ci en refusant de célébrer un mariage suite au refus de l’épouse de lui serrer la main, Bernard Guillaume, rappelle, lui, son attachement au principe de légalité: “Je réprouve le fait qu’on ne puisse pas accepter de me serrer la main. Mais je tiens à rester légaliste….Rien n’indique qu’un officier de l’Etat civil puisse refuser de célébrer un mariage pour ce motif-là.” Dura lex, sed lex. Qu’elle semble lointaine l’époque nolsiste, où ses convictions de droite (très) dure lui feront appliquer la loi Gol avec un certain zèle, allant jusqu’à intégrer sans complexe ce même Roger Nols sur sa liste PRL (dans le but de déborder Francis Duriau dans la course au mayorat).
Bernard Guillaume a bien changé: il est un homme assagit, bienveillant et ouvert, au service de tous les habitants, peu importe leurs origines ou leurs cultures. Les nombreux habitants issus des bas quartiers qui sollicitent régulièrement son assistance peuvent d’ailleurs en témoigner.

N’en conservant pas moins une certaine intransigeance sur les questions de laïcité ou d’intégration (s’autorisant encore quelques débordements incisifs sur son flanc droit pour le plaisir de ses ultras), il a pourtant évolué de manière positive sur bien des thématiques, soutenant volontiers la plupart des mesures en faveur des personnes d’origines étrangères, comme celle du cimetière multiconfessionnel qu’il se chargera d’inaugurer avec enthousiasme.
Et cette attitude semble même avoir porté ses fruits à l’occasion des dernières élections communales (avec un score de 2030 voix, 3éme score de la liste derrière le bourgmestre et l’échevine Cécile Jodogne).
Et ce ne sont pas même ses plus farouches adversaires, encore tout ébahis d’avoir vu fleurir son affiche dans de nombreuses vitrines d’habitants des quartiers populaires de la place Pavillon ou encore de la place Liedts, qui contrediront cette affirmation.
Ce docteur en médecine vétérinaire, grand défenseur de la cause animale et pour qui il s’agit sans doute du dernier mandat après 25 ans passés au service de la population, compte bien répondre présent dans quelques mois pour lancer une dernière charge aux côtés du Bourgmestre.
Avec l’espoir que cette dernière bataille ne connaisse pas le même sort que celle de l’Empereur.

Adnan Bel Khatir